Le 13 juin 2019, nous avons participé à la déclinaison française de l’événement phare de LiveRamp, RampUp. Organisé tous les ans aux US, l’événement est un incontournable outre-atlantique, rassemblant plus de 3 000 décideurs sur deux jours. Pour la première fois, RampUp débarque en France, et nous a proposé d’excellentes conférences, à propos de divers sujets MarTech. Une bonne occasion pour la société spécialisée dans l’onboarding d’affirmer sa place dans l’écosystème webmarketing français.
Invité de marque donc pour débuter cette série de conférences, le député LREM nous donne son point de vue sur l’écosystème IA français et les enjeux auxquels la France et l’Europe sont confrontés pour se démarquer sur l’échiquier technologique mondial, fortement dominé par les US et la Chine.
Cédric Villani débute en expliquant que les algorithmes mis en oeuvre par les outils d’IA sont les mêmes qu’il y a 20 ans. L’évolution tient à la quantité de donnée disponible, devenue astronomique à l’ère où l’utilisation d’internet est profondément ancrée dans les habitudes de vie et de consommation au niveau mondial. Alors que l’IA était il y a quelques années un domaine réservé aux chercheurs, son utilisation s’est accélérée du fait de l’intérêt économique que cette technologie suscite chez les entreprises et les Etats.
Malgré cet élan collectif vers l’IA, le mathématicien souligne que les algorithmes aujourd’hui en place restent très “naïfs” dans le traitement de problèmes complexes.
Nous sommes aujourd’hui à 15% d’utilisation des capacités que nous offre l’IA
Aussi, Cédric Villani remarque que le seul secteur où l’IA est aujourd’hui fortement exploité est la santé. Les progrès de recherche rendus possibles par l’IA y sont significatifs, notamment sur l’analyse du génome ou encore l’imagerie médicale.
La discussion se poursuit sur le sujet de la vision qu’ont les citoyens de la collecte et du traitement de leurs données. Le député explique qu’il existe une approche différente entre les européens et les américains sur ce sujet. Là où la culture libérale nord-américaine favorise une ouverture de la donnée, les européens ont davantage besoin de contrôle sur leur vie privée. C’est donc tout à fait naturellement que la réglementation européenne sur la donnée est la plus protectionniste au monde.
Sur ce sujet réglementaire, Cédric Villani remarque que les contraintes liées à la RGPD doivent être perçues comme des incentives à l’innovation plus que comme des freins. Le mathématicien affiche son soutien à la réglementation, tout en expliquant que le cadre juridique ne doit pas aller plus loin, afin de ne pas ralentir la croissance des plus petites entreprises, moins armées pour faire face à cette problématique.
Cédric Villani termine en expliquant que ce qui manque fondamentalement à la France pour être compétitive sur l’IA est une meilleure communication entre les acteurs. Le pays compte d’excellents centres de recherches, de très bonnes universités et écoles ainsi que des entreprises innovantes. Ce qui fait défaut aujourd’hui est l’incapacité de ces institutions à échanger pour bâtir ensemble des projets d’envergure.
Le VP Southern Europe enchaîne sur une conférence au titre “Innovation et régulation au service du progrès”.
Le speaker débute en rappelant les chiffres pharaoniques de Facebook et affirme le caractère incontournable du groupe dans les usages de communication actuels.
De par son hégémonie, Facebook a un devoir de régulation, notamment au niveau politique. Ainsi, durant les élections européennes, ce sont quelques 2,7 milliards de comptes qui ont été supprimés afin de lutter contre les propos haineux et les “fake news”.
Facebook endosse ce rôle de régulateur dans la mesure où les pouvoir public ne semblent aujourd’hui pas prêts pour le faire. Ce pouvoir de juger les contenus “bons” ou “fakes”, sans le regard des services publics et donc des citoyens peut s’avérer problématique. En effet, qu’est-ce qui fait que pour Facebook un contenu est “vrai “ ou “faux”? Dans quelle mesure des prises de position s’éloignant de leur positionnement idéologique et moral ne pourraient-elles pas être censurées ?
Cette conférence a eu l’intérêt de nous rappeler la puissance de Facebook dans la gestion des contenus, et donc des opinions publiques. Espérons que les gouvernements se saisissent rapidement de ce sujet de la régulation…
Autour de la table, des poids lourds de la télévision : SFR, Bouygues et TF1 publicité. Le sujet : la TV programmatique, ou la capacité à diffuser des publicités à la TV non pas liées à un contenu, mais à un individu. Pour les annonceurs, cette révolution permettrait de réduire leurs volumes d’espaces achetés, et donc leurs dépenses, tout en adressant leurs populations cibles grâce notamment, à la donnée digitale. Cette révolution est rendue possible par la généralisation des TV connectées, qui permettent à des acteurs comme Liveramp de lier une adresse mail (et donc un profil web), à un compte TV.
Au UK, cette technologie existe déjà. Un des intervenants souligne que cela a notamment permis à des new comers de profiter de ce canal de diffusion (70% des annonceurs TV programmatique).
En France, la publicité programmatique est déjà utilisée sur le Catch Up. Les FAI travaillent ensemble depuis plusieurs années pour préparer l’arrivée de cette technologie en France. Un des défis majeurs à adresser est l’harmonisation des méthodes de collecte et de traitement de la donnée, afin de faciliter au maximum l’utilisation du service par les annonceurs.
D’après eux, un des principaux besoins des annonceurs est la géolocalisation, permettant aux retailers de pousser un message, voire un pricing, adaptés au contexte local.
Les FAI et les chaînes semblent prêtes technologiquement pour lancer ce service. Le principal frein aujourd’hui reste juridique : le CSA doit donner son autorisation à l’utilisation de la technologie.
La conférence porte sur le sujet des marques qui aujourd’hui n’ont que très peu de données sur leurs clients finaux. En effet, que ce soit via le canal digital ou physique, les retailers sont maîtres de la donnée.
La CDO produits laitiers de Danone nous explique comment, en partenariat avec des retailers, la marque a pu reprendre le contrôle de sa donnée pour optimiser ses actions marketing. Là où il y a quelques années le KPI principal de Danone était le reach, ce sont aujourd’hui le taux de conversion et le nombre d’actes d’achat qui sont surveillés.
Danone a commencé par réaliser une segmentation client tout à fait intéressante, en créant ses clusters à partir des raisons d’achat et de non-achat. Ainsi, la marque est capable de développer des discours en fonction des freins à l’achat de chacun.
Le premier cas d’usage porte sur un partenariat avec Tesco au UK. En se basant sur ses critères de segmentation, Danone a pu recréer ses groupes de consommateurs au sein de la base client de Tesco. 16 messages ont été designés et adressés aux différents groupes afin d’analyser les plus performants. Sur cette campagne, Danone atteint un ROI de 2,7%, et une baisse du coût par ajout au panier de 98%, chiffres considérables pour une marque !
Lors d’une conférence intitulée “L’avenir du social media”, Snap Inc affiche ses chiffres de croissance et de pénétration marché. Aujourd’hui, en France, Snapchat compte 14 millions d’utilisateurs. Et contrairement à ce que l’on pourrait penser, cette audience n’est pas uniquement constituée de jeunes : 85% des utilisateurs ont plus de 18 ans.
Snapchat explique que son modèle économique s’est beaucoup appuyé sur les partenariats. En créant la section “Discover”, le réseau a souhaité “Réinventer le story-telling avec les plus grands éditeurs”. Comprenez : transformer le réseau en média, permettant d’insérer des espaces sponsorisés pour les marques.
Snap nous livre un cas d’usage intéressant avec Sprite. En lançant une campagne sur Snapchat, en parallèle d’une campagne TV, la marque affiche un reach de 15pts supplémentaires. Aussi, 45% de l’audience a pu être touchée uniquement grâce à la campagne Snapchat.
L’intervenant termine en mettant en avant l’importance que revêt la privacy et la transparence pour le réseau. Petit pique adressé à un concurrent bleu en disant que eux payent leurs impôts en France :).
Dernière conférence couverte sur un sujet passionnant : le droit de propriété des data. L’intervenant, avocat chez Baker McKenzie et ancien directeur de la CNIL connait bien la question. Ce sujet revient dans le débat pour plusieurs raisons :
L’affirmation du droit à la portabilité, porté notamment par la RGPD a contribué à relancer le débat sur la propriété de la donnée. Cependant, le législateur a mis en place ce droit davantage pour inciter à la concurrence que pour permettre au citoyen de reprendre totalement le contrôle sur sa donnée.
L’avocat explique que créer un droit de propriété implique de donner une valeur marchande à ses données. Or, les plus à même de déterminer le prix de la donnée de chacun sont les data brokers. L’asymétrie de l’information qui résulterait de ce système pourrait favoriser des abus de la part des acteurs de la data. De plus, un droit de propriété pourrait contribuer à creuser les inégalités sociales, entre des CSP dont la donnée est particulièrement recherchée, et donc chère, et des classes plus défavorisées qui ne pourraient pas tirer d’importants revenus de leurs data.
Autre point crucial, être propriétaire de ses données implique d’en être responsable. Si je vends ma donnée à un tiers et que celui-ci la modifie, je n’aurais - de fait - aucun moyen de m’en prémunir.
Pour certains acteurs économiques, notamment les start-ups, la difficulté à accéder à une autorisation de collecte et de traitement de la donnée peut être un frein à l’innovation. Au UK, l’ICO (équivalent AMF), a créé une “Sandbox”, permettant aux start-ups d’expérimenter leurs produits, bien que non réglementés d’un point de vue privacy. Un dispositif qui est poussé au niveau français par notre intervenant.
En conclusion, la mise en place d’un droit de la propriété n’est pas souhaitable dans la mesure où cela impliquerait des barrières à l’innovation, et non nécessairement plus de contrôle de chacun sur sa donnée personnelle.
En synthèse, nous avons apprécié le niveau des conférences, leur rythme et l’organisation globale, un sans faute. LiveRamp se positionne comme un acteur incontournable du marketing digital français, qui sait rassembler, donner la parole aux membres de son écosystème et prendre du recul sur son marché.
On espère y retourner l’an prochain !
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